Le programme d’Interpeace au Kenya met l’accent sur la résolution des conflits historiques et profonds ainsi que sur les inégalités socio-économiques, en particulier dans les régions du nord du pays. Lancé en 2014 dans le cadre d’un protocole d’entente avec la Commission nationale de cohésion et d’intégration (NCIC), il a réalisé des progrès importants dans la promotion de la paix et de la cohésion sociale. L’un de ses premiers succès a été enregistré dans le comté de Mandera, où des interventions ont considérablement réduit la violence cyclique entre les communautés et établi des infrastructures locales pour la paix. Les leçons tirées de cette phase pilote ont désormais été adoptées et diffusées dans un contexte plus large, couvrant les comtés du Nord et les collectivités transfrontalières.
Interpeace a été le premier à mettre en place des mécanismes de paix communautaires à Mandera, établissant des références pour la résolution des conflits au Kenya. Ses interventions clés incluent la mise en place d’espaces de dialogue inter-villages (IVDS), qui fournissent des plateformes structurées pour négocier les différends, favoriser la réconciliation et prévenir les conflits locaux. En complément de ces efforts, les comités de surveillance des conflits (CMC) ont contribué à assurer le suivi de la mise en œuvre des accords de paix en temps réel, désamorçant ainsi les tensions et permettant une réponse proactive aux conflits, ainsi qu’un renforcement des efforts de paix durables menés localement dans l’ensemble des zones de conflit.
Interpeace a soutenu la mise en place du Centre régional pour la paix à Mandera, un pôle novateur de médiation, de recherche et de renforcement des capacités pour les acteurs de la paix. Celui-ci a considérablement renforcé l’appropriation locale des processus de paix en offrant un espace neutre pour la résolution des conflits et l’engagement multipartite, établissant ainsi un précédent pour des initiatives similaires dans d’autres zones vulnérables auxaffrontements . Il a également permis la mise en place d’un mécanisme d’alerte et de réaction rapide aux conflits. En outre, le Forum des acteurs de la paix des comtés (FPAC) est devenu une plateforme de coordination essentielle, réunissant les dirigeants locaux, les organismes de sécurité, les représentants communautaires et les partenaires du développement pour aligner les efforts de consolidation de la paix, promouvoir la responsabilisation et institutionnaliser les systèmes d’alerte précoce et de réponse au niveau des comtés. Ces approches ont non seulement réduit la violence communautaire et les conflits liés aux ressources naturelles à Mandera, mais elles ont également été reconnues comme des pratiques exemplaires pour une mise en œuvre plus large dans tous les comtés du nord du Kenya.
S’appuyant sur ce succès, le programme a été étendu en 2019 aux régions du Rift du Nord et de Wajir à la suite d’évaluations rapides de la fragilité et de la résilience. Bien que la paix dans le Rift du Nord demeure fragile, des jalons notables incluent l’accord de paix de Baragoi de 2020 et l’accord de paix d’Orwa 1 de 2021, qui ont joué un rôle clé dans l’atténuation de décennies de conflit dans la ceinture de la vallée de Suguta et à Samburu North.
En 2022, le programme s’est étendu au comté de Marsabit pour faire face aux conflits intercommunautaires de longue date qui avaient provoqué des meurtres, la destruction de biens et des déplacements de populations. Cette intervention a commencé par des recherches sur les« Défis à la paix dans le comté de Marsabit », qui ont servi de base aux engagements communautaires ciblés. L’initiative “Faire taire les armes à feu” constitue une réalisation importante qui a contribué à une réduction notable de la violence depuis 2023. Cette même année, le programme s’est également étendu au comté de Laikipia, en commençant par des recherches sur les conflits avant de lancer des engagements de paix pour faire face aux tensions émergentes.
À l’avenir, il continuera d’étendre sa présence dans le comté de Laikipia tout en élargissant ses engagements pour la paix afin d’inclure Isiolo, Meru et un accent plus marqué sur les comtés voisins. En outre, il renforcera les efforts transfrontaliers de consolidation de la paix dans le triangle de Mandera, englobant l’Éthiopie et la Somalie.
Un accent clé reste mis sur le renforcement des infrastructures de paix autosuffisantes au niveau communautaire par une étroite collaboration avec le Réseau pour la paix, la cohésion et le patrimoine (NEPCOH) Trust, une organisation locale issue du travail d’Interpeace au Kenya. Interpeace s’est également engagée à intégrer la consolidation de la paix dans d’autres secteurs en soutenant les organismes humanitaires et de développement afin qu’ils soient plus sensibles à la paix, et en abordant les intersections entre la paix, le changement climatique, la santé mentale et le soutien psychosocial (MHPSS). Le programme met également l’accent sur l’ouverture des régions marginalisées du pays grâce au plaidoyer pour la paix. Les phases en cours et précédentes de ce projet ont été généreusement financées par le ministère fédéral allemand des Affaires étrangères et l’Union européenne (UE).
L’objectif du programme est de contribuer à faire progresser la paix, la sécurité et le développement dans les comtés fragiles du Kenya en transformant les communautés locales en agents de paix, capables de gérer leur conflit par des moyens non violents.
En 2024, le Kenya a été confronté à d'importants défis sécuritaires, notamment de violentes manifestations contre le projet de loi de finances 2024, qui ont fait des victimes et contraint le retrait de celui-ci. Les violations des droits humains, notamment les arrestations arbitraires et les disparitions, ont provoqué une inquiétude mondiale. Les gangs organisés de jeunes ont accru l'insécurité dans les zones urbaines, tandis que le banditisme dans la vallée de Kerio, à Samburu, à Isiolo et à Meru a abouti plus de 75 victimes et déplacé de nombreuses personnes. Les troubles ont mis en évidence le besoin urgent et permanent de réformes de la gouvernance et de la sécurité.
Au Kenya, Interpeace et ses partenaires s'efforcent de renforcer les capacités des infrastructures locales, infranationales et nationales de consolidation de la paix afin de prévenir et de gérer collectivement les conflits violents et d'établir une confiance horizontale et verticale. Cette approche a impliqué le soutien d'initiatives collaboratives en matière de sécurité, de moyens de subsistance et de gestion des ressources naturelles, notamment la mise en place de structures communautaires de partage des ressources et de mécanismes d'alerte précoce gérés et gérés localement.
Ce travail a permis de renforcer la cohésion sociale et la résilience aux chocs climatiques, la signature d'accords de partage des ressources entre les communautés et l'engagement des acteurs du développement et des gouvernements des comtés à accroître les investissements dans les zones sensibles. Interpeace et ses partenaires ont impliqué 19 937 personnes dans cette initiative, dont 3290 femmes et 5287 jeunes. Le projet a soutenu 23 infrastructures locales et a permis de résoudre 54 conflits. Interpeace a aidé dix activités génératrices de revenus, sept avec des acteurs étatiques et 17 avec des acteurs de la sécurité.