Renforcer la confiance entre les communautés et la police en Éthiopie

17 octobre, 2022

Imaginez une communauté qui collabore étroitement avec la police pour assurer la sécurité publique et l'efficacité du maintien de l'ordre. Imaginez maintenant que cette approche se passe dans une société où les conflits violents sont fréquents, un renforcement de la confiance qui se déroule actuellement en Éthiopie. La police et le grand public collaborent pour identifier les problèmes de la communauté, puis conçoivent et mettent en œuvre des solutions à ces problèmes en considérant les connaissances locales de la région et des conditions culturelles, sociales et psychologiques de la société. En Éthiopie, cette situation permet de rompre avec le style réactif de la police pour adopter une approche plus confiante, proactive et préventive.

Ce pays paradoxal en pleine mutation. Depuis l'arrivée au pouvoir d'Abiy Ahmed en 2018, l'Éthiopie s'est engagée sur la voie d'une importante transformation sociale, économique et politique. Simultanément, elle a connu une guerre civile dévastatrice qui a déplacé des millions de personnes, coûté d'innombrables vies et provoqué une fracture importante dans la structure fédérale et le tissu ethnique de la société.

Bien que les conflits en cours en Éthiopie et les crimes de guerre présumés aient porté atteinte à la réputation nationale et internationale du pays dans le cadre de son programme de réforme, de nombreuses initiatives gouvernementales et non gouvernementales sont en cours. Elles doivent permettre d’améliorer les relations entre les communautés et l'État, répondre aux besoins des communautés et réformer les institutions afin d'approfondir la démocratie, d'élargir la participation des citoyens et de promouvoir la paix. Par exemple, vers la fin de l'année 2020, le ministère éthiopien de la paix a présenté une nouvelle doctrine progressive en matière de maintien de l'ordre, engageant la police fédérale et régionale à se soumettre à un contrôle public plus strict, à améliorer le respect de la diversité et à respecter les normes internationales en matière de droits humains. Interpeace, en partenariat avec l'Université de police d'Éthiopie, travaille sur un programme de renforcement de la confiance entre les citoyens et la police afin de fournir une méthode permettant de faire de la philosophie progressiste de la police éthiopienne une réalité sur le terrain.

En 2021, le ministère éthiopien de la paix et Interpeace ont effectué un examen de base et interrogé un total de 1786 personnes de quatre Woredas (unités administratives au niveau du district) pour évaluer les difficultés rencontrées dans les interactions entre la communauté et la police. L'étude a révélé que la confiance est depuis longtemps le chaînon manquant des services de police. Les jeunes notamment étaient sceptiques à l'égard de la police, et un manque de cohérence dans le soutien de la police communautaire locale aux programmes de sécurité publique dans les quartiers a été observé. Peu de choses ont été dites sur celui apporté aux femmes et aux personnes handicapées, ce qui a conduit à la conclusion que les plateformes existantes pour assurer un engagement public actif étaient superficielles. Les résidents de la communauté ayant peu d'influence sur l'identification, la hiérarchisation et la résolution des problèmes communautaires urgents.

Pour faire face à cette situation, ce programme de police communautaire met l'accent sur l'importance de la collaboration avec le public. Ces deux parties prenantes choisissent les préoccupations les plus prioritaires et travaillent ensemble pour mieux comprendre les problèmes de sécurité. À cette fin, un logiciel de système d'information géographique (SIG) est utilisé pour cartographier électroniquement les lieux des événements de sécurité communautaire découverts dans les Woredas. Il a permis à la police et au public de visualiser et de comprendre les problèmes de manière novatrice. Il encourage la discussion sur les faits affichés sur l'écran du SIG plutôt que sur les perceptions individuelles des problèmes. Par exemple, les habitants d'un Woreda peuvent se plaindre à la police d'une augmentation de la criminalité de rue, comme les agressions. La police saisit les données de l'incident dans le programme de cartographie SIG. Elle partage les cartes produites avec la communauté et analyse avec elle les données afin de mieux comprendre les causes de l'augmentation des incidents et de concevoir une réponse pour empêcher que les crimes ne se reproduisent. Le logiciel ne peut être utilisé que dans le cadre d'un travail préventif avec les communautés et non pour soutenir des enquêtes criminelles qui pourraient compromettre la confiance dans la police.

Les questions qui sont importantes pour le public ne le sont pas toujours pour la police, et vice versa. Le SIG communautaire permet à toutes les personnes impliquées d'acquérir une compréhension commune, favorise la confiance et le dialogue ouvert, et conduit à la mise en œuvre d'actions de résolution de problèmes à plus long terme.

L'un des principaux objectifs de cette approche conjointe entre la police et les citoyens est la réduction de l'insécurité dans une communauté. Les citoyens, quant à eux, ne seront disposés à travailler avec la police que s'ils constatent une amélioration de la sûreté et de la sécurité publiques et s'ils ont confiance dans la police et les autres forces de l'ordre.