Développer un baromètre participatif pour améliorer la gouvernance de la justice en Guinée-Bissau

6 octobre, 2020

La justice en Guinée-Bissau est considérée comme la pierre angulaire de la paix entre citoyens. Cependant, le mauvais fonctionnement et la mauvaise administration du système judiciaire, combinés à des problèmes de corruption et d'impunité généralisée, ont entravé la gouvernance efficace du secteur de la justice dans le pays. Les pratiques traditionnelles ou informelles de justice sont très appréciées par la population en Guinée-Bissau et sont profondément ancrées dans les coutumes des différentes communautés qui comptent sur elles pour la résolution de nombreux conflits. Bien que ces pratiques offrent des avantages en termes de coûts et d'accessibilité physique, des recherches ont montré comment ces mécanismes de résolution des conflits affectent de manière disproportionnée les secteurs vulnérables de la population.

Le secteur de la justice en Guinée-Bissau est donc très complexe et caractérisé par une pluralité de pratiques, où le système de justice formel coexiste avec des structures informelles et traditionnelles. L'insatisfaction générale à l'égard du secteur, causée par des facteurs et des acteurs négatifs, tant dans les pratiques formelles qu'informelles, souligne la nécessité d'une amélioration. Au cours de la dernière décennie, le secteur de la justice a fait l'objet de réformes, mais le processus s'est heurté à des difficultés récurrentes dans sa mise en œuvre. Dans ce contexte, Interpeace et son partenaire local Voz di Paz ont cherché à créer de nouveaux mécanismes et capacités pour une citoyenneté active, habilitée à suivre, de même qu’évaluer et défendre des politiques publiques adéquates dans le secteur de la justice. Un point de départ essentiel a été l'établissement d'un baromètre participatif pour fournir des données crédibles, indépendantes et représentatives sur la situation dans le pays, afin de contribuer à une participation accrue des citoyens à la gouvernance locale de la justice.

Le rapport intitulé « Sintidu di justisa » (Le sens de la justice) - Baromètre participatif sur les perceptions et les expériences de la population : comment améliorer la gouvernance de la justice en Guinée-Bissau, présente les résultats d'un processus de recherche mené à travers le pays entre septembre 2018 et février 2020, impliquant plus de 4 250 personnes, dont 3 400 entretiens directs dans 180 communautés. Le rapport met en évidence les principaux éléments qui composent les différentes dimensions du secteur de la justice, afin de mieux comprendre des questions telles que le concept de justice, l'accès à la justice, l'expérience des procédures judiciaires et le rôle des citoyens et des mécanismes de justice traditionnels. De plus, une analyse de genre a également été réalisée dans le cadre de l'initiative.

Les conclusions générales de celle-civisent à fournir une base solide pour les améliorations structurelles du secteur de la justice en Guinée-Bissau. Les participants ont décrit les procédures judiciaires officielles comme n'étant ni suffisamment transparentes ni égalitaires et ont identifié certains des principaux obstacles empêchant la bonne gouvernance dans le secteur de la justice, notamment la corruption, l'accès limité à la justice, les inégalités sociales et économiques et le manque de confiance dans le système judiciaire. Des expressions comme « la justice de Guinée-Bissau ne s'applique qu'aux pauvres » démontrent la perception de la population à l'égard du système judiciaire - 55 % des participants pensent qu'il y a beaucoup d'interférences de la part de personnes influentes et 47 % pensent que les personnes influentes jouissent d'une grande impunité. Si le fait que la moitié de la population (54 %) ne se sente pas en sécurité pour signaler ou témoigner, cela met en lumière les obstacles réels dans les pratiques judiciaires.

Le baromètre ne montre pas seulement les défis et les faiblesses institutionnelles du système judiciaire bissau-guinéen, mais il met également en évidence les éléments du secteur judiciaire les plus pertinents pour la population. La grande majorité de la population (91 %) pense que certains conflits sont mieux résolus par la justice traditionnelle, qui est considérée comme la meilleure forme de résolution des conflits par 61 %, en raison de sa capacité de réconciliation et de sa connaissance de la réalité. En conséquence, la majorité de la population insiste sur le fait que le système judiciaire formel doit trouver des moyens de collaborer avec le système traditionnel dans la résolution des conflits. Par conséquent, les résultats du baromètre n'indiquent pas une dichotomie ou un conflit entre la justice formelle et la justice traditionnelle. Au contraire, ils signalent le besoin urgent d'un travail collaboratif et coordonné entre les deux systèmes.

En ce sens, l'étude formule également des recommandations, des solutions, des mesures et des actions essentielles pour réaliser les changements nécessaires dans le secteur de la justice afin de développer un système plus efficace et répondant aux besoins de la population.

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